Récit de pratique cérémonielle ou cultuelle

Pèlerinage à pied à l'occasion de l'Assomption

Tradition: Christianisme
Appartenance: Catholicisme (rite latin)
Diocèse, association ou regroupement: Diocèse de Trois-Rivières
Paroisse, congrégation ou équivalent: Diocèse de Trois-Rivières

Classé sous Pratique religieuse (9300), Cérémonie (9310), Pèlerinage (9317).

Historique général


Jeanne Mance Cormier, pèlerin et organisatrice du groupe de Québec
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Le pèlerinage religieux représente une forme de dévotion populaire qui s'est particulièrement développée au Moyen Âge, essentiellement en lien avec le culte des saints. Deux idées sous-tendent ce culte : les saints agissent comme intermédiaires entre Dieu et les hommes et les lieux sont sacralisés par la présence du corps d’un saint ou d'une relique. Il existe différents types de pèlerinages, notamment les pèlerinages populaires où les gens sont attirés par le goût du merveilleux et la recherche de la guérison du corps ainsi que les pèlerinages de dévotion qui visent le salut de l'âme par l'ascèse personnelle. Les plus importants pèlerinages du monde chrétien ont lieu à Jérusalem, à Rome et à Saint-Jacques-de-Compostelle.
Le pèlerinage de l’Assomption fait partie des pèlerinages mariaux qui se sont développés en Europe, surtout à partir du 12e siècle. Il ne peut être dissocié du pèlerinage de Lourdes, en France, qui a servi de modèle aux autres pèlerinages. Celui-ci commémore la mort et la résurrection de Marie, en plus de marquer l'élévation de Marie au ciel, corps et âme, en vertu d'un privilège particulier. Le pèlerinage de l’Assomption représente surtout un moyen d’adresser des doléances que Marie présentera à Dieu le Père. Parmi les plus grands sanctuaires mariaux figurent Chartres, Rocamadour, Notre-Dame du Puy et Lourdes.

Description


Michelle Robitaille, pèlerin de Québec
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Le plus important pèlerinage marial au Québec est celui de l’Assomption, le 15 août, au sanctuaire Notre-Dame-du-Cap au Cap-de-la-Madeleine. À cette occasion, plusieurs groupes partent de différents endroits au Québec et parcourent des centaines de kilomètres à pied. Le trajet dure en moyenne de 7 à 15 jours. Le groupe de la ville de Québec a été fondé en 1989. Au départ, leur parcours débutait à la Basilique-cathédrale Notre-Dame de Québec et durait sept jours. En 1995, les organisateurs ont décidé de commencer leur pèlerinage à la basilique Sainte-Anne de Beaupré afin de prolonger le trajet de deux jours et de s’imprégner ainsi de l’esprit de la neuvaine entourant la célébration de l’Assomption de la Vierge Marie. Les pèlerins parcourent plus de 150 km à pied.
Le groupe de Québec a été fondé par Claire Gagnon Marcoux. La devise du groupe est « Prier pour la paix dans le monde », en l’honneur de Marie, reine de la paix. Pour la majorité des pèlerins de Québec, le pèlerinage est donc un moyen de prier pour la paix au sein des couples et des familles dans le monde entier. Il est aussi un moyen de sortir du quotidien, de se libérer du monde matériel et de trouver le sens de la vie : « En marchant, on n’a pas besoin de tout ce qu’on a à la maison pour être heureux. C’est voir la vie autrement, qu’on est de passage ici. Si on veut que le passage soit heureux, c’est à nous de faire ce qu’il faut pour rendre les gens heureux » (Michelle Robitaille). Les pèlerins transmettent aussi les intentions des gens qui ne peuvent pas se déplacer. Une fois rendus au Cap-de-la-Madeleine, ils les déposent au pied de la statue de la Vierge Marie. En 2010, le groupe de Québec comptait 18 pèlerins âgés de 8 mois à 80 ans. L’itinéraire est jalonné par des statues de sainte Anne et de Jésus, des cimetières, des églises et de petites chapelles.
Les principales raisons qui poussent les gens à participer à un pèlerinage sont de prier les saints, de vénérer des reliques ou encore d’obtenir une faveur ou l’ascèse. Le trajet se fait à pied et le groupe est conduit par une personne qui porte la croix. Lorsqu’elle est fatiguée, quelqu’un d’autre vient la porter à son tour. Porter la croix est un geste de pénitence qui rappelle Jésus-Christ et le chemin de la croix.
La nourriture et les vêtements sont transportés en voiture. Les enfants qui participent au pèlerinage font également une partie du trajet en voiture. Le jour, les pèlerins sont accueillis par des gens qui leur offrent de l’eau et des chaises pour qu’ils puissent se reposer. Les monastères hébergent également les pèlerins, car il s’agit d’un devoir de charité. Il existe aussi de nombreux hospices spécialisés tenus par des fondations laïques ou ecclésiastiques.
Chaque jour de pèlerinage suit un horaire semblable : la première partie de la journée, la marche se déroule en silence, les gens lisent des prières ou prient individuellement. La deuxième partie de la journée, la prière est collective. Les pèlerins disent le rosaire et entonnent des chansons mariales. Lorsqu’ils s’arrêtent, ils discutent un peu et apprennent à se connaître. Au fil des jours, de nouveaux pèlerins se greffent au groupe et viennent marcher une journée ou plus. Il y a aussi des gens qui viennent marcher avec le groupe pour se préparer au pèlerinage de Compostelle. Malgré le mouvement au sein du groupe, il y a toujours un noyau stable de pèlerins qui arrivent à tisser des liens entre eux. « Ce que j’aime le plus de ce pèlerinage est l’intériorité qu’on peut y avoir, y trouver et retrouver à nouveau et le contact avec les gens qui est toujours enrichissant » (Michelle Robitaille).
En 2010, les pèlerins de Québec sont arrivés à Notre-Dame-du-Cap le 14 août, à midi. La nuit du huitième au neuvième jour, ils ont dormi dans une église située près du site. Auparavant, cette pratique nommée « incubation » était, semble-t-il, très favorable aux miracles. De nos jours, elle permet le rassemblement de tous les groupes de pèlerins de la province ainsi que le partage de l’expérience de la marche avec les autres. Dimanche, environ 500 marcheurs se sont rendus à la basilique où ils ont été accueillis par des applaudissements. Ils ont participé à la messe des marcheurs, l’occasion d’adresser leurs intentions à la Vierge Marie.
Pour Yolande Blanchard, la doyenne du groupe, le pèlerinage est à la fois un exercice physique et un moyen de prier pour la famille. Pour Claude Cloutier, marcher « c’est la paix que tu peux donner à quelqu’un à travers ce que tu vis. Pour marcher comme ça, on fait un pas à la fois. En faisant un pas à la fois, un autre pas va être fait avec celui qui t’accompagne. Moi je suis retraité et je fais de l’accompagnement auprès des personnes âgées ou dans les hôpitaux. Quand tu accompagnes ces personnes, souvent t’es la seule personne que l’autre rencontre. Dans le pèlerinage, c’est la même chose : faire des pas à côté des gens, rencontrer des gens que tu croises sur le bord de la rue. Les autres veulent aussi être avec toi. C’est le partage puisque souvent il n’y a personne à qui parler ou qui est capable d’écouter » (Claude Cloutier). Le pèlerinage n’est pas uniquement quelque chose de personnel, il s’agit aussi d’un acte de partage de la foi avec l’autre, que ce soit les autres pèlerins ou des étrangers rencontrés sur le bord du chemin. « C’est la joie que tu peux donner à travers ce que tu peux faire pour les autres. » (Claude Cloutier)

Apprentissage et transmission


Messe de bénédiction des pèlerins à la cathédrale Sainte-Anne-de-Beaupré
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Le nombre de pèlerins a diminué au cours des dernières années et les coûts de l'organisation du pèlerinage ont augmenté. Cependant, ces difficultés sont intégrées dans la définition de tout pèlerinage reconnu comme un instant plein d’imprévus et d’austérité. Malgré la diminution de l’intérêt pour le pèlerinage, les gens restent optimistes, car, selon eux, la marche n’appartient pas aux gens, mais à la Vierge Marie qui planifie tout. « Ce n’est pas notre pèlerinage, c’est son pèlerinage. » (Claude Cloutier)

Localisation

Municipalité: Trois-Rivières
Région administrative: 04 Mauricie
Lieu: Sanctuaire Notre-Dame-du-Cap, 626, rue Notre-Dame Est , Trois-Rivières (Qc), G8T 4G9
Téléphone: 819-374-2441
Site Web: http://www.sanctuaire-ndc.ca

Source

Jeanne Mance Cormier, Michelle Robitaille, Yolande Blanchard et Claude Cloutier
Titre, rôle et fonction : Jeanne Mance Cormier est l'organisatrice du groupe de pèlerins de Québec.
Lien avec la pratique : Michelle Robitaille, Yolande Blanchard et Claude Cloutier ont participé au pèlerinage à pied de l'Assomption en partance de Québec vers le sanctuaire Notre-Dame-du-Cap.

Enquêteurs : Daniela Moisa, Marjolaine Boutin
Date d'entrevue : 6 octobre 2010

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